WPM_le-ras-le-bol-monte-chez-les-télétravailleurs Crédit : thoughtcatalog
Alors que le gouvernement s’inquiète de l’érosion du télétravail, le malaise grandit chez les salariés contraints de rester chez eux.  Une enquête, dévoilée fin janvier par Fellowes, dresse un constat plutôt sombre des conditions de travail à domicile.

Le télétravail à plein temps doit rester la norme pour l’ensemble des activités qui le permettent. C’est le rappel à l’ordre lancé par le gouvernement à l’attention des partenaires sociaux, réunis lundi 1er février en visioconférence. Annoncée quelques jours plus tôt par le Premier ministre, Jean Castex, cette mise au point intervient dans un contexte de relâchement du télétravail. Selon une enquête Harris Interactive commandée par l’exécutif, la part des salariés exclusivement en présentiel atteint désormais 58% contre 52% lors de la précédente enquête réalisée entre le 2 et le 8 novembre. Parmi les actifs pouvant « facilement » télétravailler à temps complet, seuls 30% sont restés chez eux en janvier contre 45% en fin d’année dernière.

Un sentiment d’isolement en hausse

Si le gouvernement hausse le ton, il n’a toutefois remis en cause l’assouplissement du protocole sanitaire. Depuis le 7 janvier, le texte prévoit la possibilité pour les salariés de revenir une fois par semaine au bureau. Pour les syndicats, il était essentiel de ne pas toucher à cette disposition alors que le malaise et les lassitudes grandissent chez les salariés contraints d’exercer leur activité à domicile. Toujours selon le sondage Harris Interactive, parmi les actifs ayant travaillé à distance au moins en partie fin janvier, 44% affirmaient se sentir isolés (contre 41% en novembre), 36% déclaraient se sentir plus stressés (+7 points) et 31% davantage angoissés (+1 point). Un mal-être confirmé par une autre enquête publiée fin janvier par le fabricant Fellowes, spécialiste des solutions ergonomiques pour les espaces de travail. Réalisée auprès de 7 000 employés de bureau à travers l’Europe, dont 1000 en France, l’étude dresse un constat plutôt sombre des conditions de travail à domicile. Plus de la moitié des salariés français interrogés (54%) déclarent travailler plus d'heures lorsqu'ils exercent leur activité chez eux plutôt qu’au bureau. Un tiers se sent coupable de faire une pause et 30% sont trop occupés pour la faire. Plus de 40% estiment qu'ils doivent être disponibles à tout moment de la journée.

Un équipement toujours insuffisant

 

En plus de la fatigue mentale, leur environnement de travail matériel ne semble pas s’être amélioré depuis le premier confinement. Seuls 50% disposent aujourd’hui d’un poste de travail adapté. Un ratio confirmé par un autre sondage réalisé récemment par JPG.

Parmi ceux qui ne disposent pas de bureau, 12 % admettent travailler depuis leur canapé, 4% depuis leur lit et 4% par terre. Conséquence, ils sont aussi nombreux à déclarer des douleurs physiques : un tiers souffre de fatigue oculaire (41%), de mal de dos (39%) et de maux de tête (31%). Plus ou moins tolérée au début de la crise, cette absence d’ergonomie est aujourd’hui de plus en plus mal vécue : 47% des répondants affirment que leur entreprise ne les a pas aidés à créer de bonnes conditions de travail à domicile.

Et ils sont 33 % à penser que leurs employeurs ne se soucient pas de leur santé mentale - faisant passer la productivité, les résultats et le gain d’argent au-delà de leur bien-être. Pour s’équiper convenablement, 65 % ont consenti à investir eux-mêmes dans du matériel. Pas surprenant dès lors que si la grande majorité des salariés souhaite continuer à travailler à domicile sur le long temps (88 %), ils sont aussi nombreux à réclamer un encadrement par le gouvernement. Pour l’heure, la réglementation française n’impose que très peu d’obligations.

L’Accord national interprofessionnel (ANI), signé fin novembre, laisse une grande latitude aux entreprises pour définir les mesures à mettre en œuvre. Selon Yannick Benet, ostéopathe et ergonome, « il est donc impératif pour les employeurs d’agir et de proposer un accompagnement global de leurs salariés avec des équipements ergonomiques adaptés ainsi qu’une formation des collaborateurs ».