Alors que le trafic de données explose, sous l’effet notamment du télétravail, une étude de Riposte Verte fait le point sur les bonnes pratiques à adopter au bureau comme à la maison afin de réduire l’empreinte environnementale de ses activités numériques

Loin de l’image éthérée et évanescente qui lui est fréquemment accolée, le numérique induit des conséquences environnementales réelles et majeures. « Son empreinte est de 4 % à l’échelle planétaire, elle était de 2 % il y a 10 ans et devrait passer à 6 % d’ici à 2025, indique Frédéric Bordage, expert indépendant membre de la communauté Green IT. Ce qui veut dire qu’elle aura triplé en 15 ans, c’est totalement inédit ! » Selon le spécialiste, il existe principalement trois sources d’impacts imputables au numérique : la fabrication des appareils, la production d’électricité nécessaire à leur fonctionnement et leur fin de vie. Le risque d’un tel engrenage, s’il n’est pas enrayé, est double : en plus de la pollution générée, l’épuisement voire la disparition pure et simple des matières premières nécessaires aux technologies numériques n’est plus à exclure.

Si 80 % des impacts d’un équipement sont liés à sa fabrication, le comportement des utilisateurs joue également un rôle non négligeable dans la consommation électrique, source des 20 % restants. C’est ce que rappelle une étude publiée en mars dernier par L’Observatoire du bureau responsable, animé par Riposte verte qui a interrogé 1 216 salariés sur leurs bonnes (et moins bonnes) pratiques en matière d’usage des outils numériques.

Naviguer sobrement

Que ce soient les ordinateurs, tablettes ou portables, au travail comme à la maison, les appareils électroniques sont quotidiennement sollicités, principalement pour consulter des pages web, chercher un itinéraire ou encore écouter de la musique ou regarder une vidéo en ligne. Quelques gestes élémentaires permettent toutefois de limiter l’impact environnemental de ces heures de navigation sur la toile. Tout d’abord, privilégier le Wi-Fi plutôt que la 4G. Un usage plutôt bien intégré par les personnes interrogées, puisqu’elles sont 83 % à l’appliquer au quotidien. Autre écogeste efficace, mais moins répandu : privilégier l’utilisation d’un disque dur à la connexion au cloud notamment pour l’écoute de la musique ou le visionnage de vidéo. L’étude recommande ainsi de télécharger préalablement les fichiers plutôt que de recourir au streaming qui représente actuellement 80 % du trafic Internet annuel. En 2018, le visionnage de vidéos en ligne générait déjà plus de 300 mégatonnes de CO2, selon l’Ademe.

En complément, il est également préconisé de désactiver la lecture automatique des vidéos dans le fil d’actualités des réseaux sociaux. 41 % des sondés appliquent déjà ce conseil. Ils sont également 20 % à utiliser une application comme « Audio only Youtube » qui permet de ne conserver que le son d’une vidéo que vous ne regardez pas vraiment (clip, interview, débat…).

Au quotidien, les habitudes de navigation peuvent également influer sur les consommations d’énergie. L’étude suggère ainsi de fermer systématiquement les onglets non utilisés (un réflexe mis en œuvre par 71 % des répondants) et de sauvegarder en « favoris » les sites souvent consultés (65 %). Une autre bonne pratique consiste à taper directement l’adresse URL d’un site que l’on souhaite consulter. Ce simple geste permet de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre comparé à une requête dans un moteur de recherche.

Gérer, trier et supprimer ses mails

Il s’échange dans le monde entre 8 et 10 milliards d’emails par heure. Des chiffres auxquels il faut encore ajouter les 3 millions de spams envoyés chaque seconde, soit près de 100 milliards par an. Et chaque envoi émet quelques grammes de CO2 : 4 g dans le cas d’un message simple et 19 g avec une pièce jointe de 1 Mo. Un bilan qui s’alourdit avec le nombre des destinataires : multiplier par 10 le nombre d’adresses, c’est multiplier par 4 l’impact environnemental d’un email. Face à cette avalanche de messages, la plupart des personnes interrogées affirment gérer activement leurs boîtes de réception (avec ou sans logiciel dédié) qu’il s’agisse des courriers indésirables (83 %) que des lettres d’informations non lues auxquelles il est indispensable de se désabonner (74 %). En plus de ces actions, l’étude rappelle la nécessité de vider très régulièrement sa corbeille et d’archiver ses messages sur le disque afin d’éviter la surcharge des serveurs.

" L'empreinte environnementale du numérique est de 4% à l'échelle planétaire, elle était de 2% il y a 10 ans et devrait passer à 6% d'ici 2025. " Frédéric Bordage, expert indépendant, membre de la communauté Green IT

 

Mieux informés des conséquences de leurs pratiques, les utilisateurs semblent aussi prêts à les modifier. Ils sont déjà 94 % à modérer l’emploi du bouton « Répondre à tous » de leur messagerie et 70 % s’attachent à diminuer le nombre ou le poids des pièces attachées. Parmi ces derniers, 65 % déclarent privilégier la transmission de données via un serveur interne à leurs collègues, mais seuls 36 % ont ce réflexe avec leurs contacts via un serveur externe

infographies1.png

Configurer ses équipements

D’autres gestes ne sont pas moins essentiels, comme programmer un écran de veille non-animé, paramétrer la luminosité adaptative des écrans (74 % le font déjà), mais aussi désactiver le GPS, le Wifi et le Bluetooth dès que possible (61 %). Ces bonnes pratiques en matière de gestion des équipements gagneraient encore à être étendues. Seuls 52 % des sondés désinstallent les applications non utilisées. Et ils ne sont encore que 64 % à vider régulièrement le dossier « Téléchargement » de leur ordinateur. Ces écogestes ne se limitent pas à la journée de travail. Pour réduire la consommation d’énergie, il est recommandé de débrancher tous ces équipements pour la nuit ainsi que la box TV/Internet. Pour l’heure, seuls 42 % et 20 % (respectivement) des utilisateurs ont pris cette habitude.  

infographies2.png

Ceux qui veulent aller plus loin devront également modifier leur comportement d’achat. Diminuer le taux d’équipement, allonger la durée de vie des appareils et favoriser la réparation et le réemploi s’annoncent comme les grands enjeux des prochaines années. Au risque sinon de voir l’empreinte carbone du numérique doublée d’ici à 2025.

">