Le full remote, chef de file des expérimentations du travail en distanciel, met en évidence les points saillants sur lesquels les entreprises doivent être vigilantes, avec, en première ligne les conditions et le poste de travail du salarié. Témoignage de Caroline Zanaret-Giros, Directrice générale adjointe de Boursorama.

 
 
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Comment se sont déroulées la réflexion puis la mise en place de votre politique télétravail ?

La réflexion sur le télétravail est globalement assez récente dans le secteur bancaire. Chez Boursorama, elle a été facilitée par notre modèle de banque en ligne : dès le départ nous n’avions pas cette problématique de gestion du guichet ni de la personnalisation de la relation client dans une agence physique. Pour autant, au moment de la crise de Covid-19, nous n’avions pas du tout recours au télétravail alors même que nous étions techniquement prêts pour ce fonctionnement. Comme beaucoup d’entreprises, par la force des choses, nous avons dû mûrir rapidement une réflexion sur le sujet. Nous avons donc identifié deux catégories de collaborateurs.

La première, des salariés très opérationnels qui disposent de tâches clairement identifiées de production (la prise d’appel de clients, le traitement des justificatifs d’identité, etc.) et capables de les réaliser en autonomie sans la supervision directe du manager. Ce sont généralement des profils jeunes et des non-cadres qui constituent aujourd’hui la moitié de nos effectifs et qui fonctionnent en full remote. Ils reviennent au bureau deux jours par mois à l’occasion de séminaires au cours desquels ils ne réalisent pas leur tâche de production habituelle mais se mettent à jour des résultats de l’entreprise, de l’actualité de leur département et réalisent des réunions avec les managers.

La deuxième catégorie regroupe toutes les autres fonctions, avec davantage d’encadrement : des salariés qui travaillent en mode projet, à la mise en place de nouveaux chantiers, à la refonte de processus, etc. Ceux-là sont soumis à un régime plus standard avec deux jours de télétravail roulants selon les semaines que nous fixons.

Qu’a permis le recours à cette politique full remote ?

Nous avons considérablement élargi notre bassin de recrutement en France tout en conservant une grille de salaires établie sur les standards parisiens. Un avantage qui augmente potentiellement aussi le pouvoir d’achat des personnes habitant en province. Cela nous a également permis de recruter des profils plus qualifiés, qui disposent souvent d’une première expérience en agence dans le milieu bancaire, ce qui facilite la formation. Côté salariés, le principal élément de satisfaction réside dans le meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle en plus d’enlever l’irritant lié aux transports. Avec la possibilité d’une évolution professionnelle, d’une montée en compétences et d’un changement de régime télétravail.

Isolement des salariés, bureaux vides, baisse de productivité… Face à ces situations certaines entreprises rétropédalent, parfois de manière assez brutale, sur le travail hybride. Prévoyez-vous une renégociation importante de vos accords télétravail en 2024 ?

La formule magique qui conviendrait à tous les collaborateurs n’existe pas. De notre côté, l’équation est aujourd’hui assez équilibrée depuis un peu moins de deux ans et ne nécessite que des petits ajustements. Chaque année nous réalisons des enquêtes sur notre fonctionnement et le taux de satisfaction est assez haut, avec une note globale de satisfaction de nos collaborateurs de 8,8 salariés sur 10. Il faut toutefois rester attentif au sentiment d’isolement chez les télétravailleurs ainsi qu’à la santé mentale de tous, notamment des managers, pour qui ce fonctionnement représente un énorme changement dans la façon d’animer son équipe à distance. On prend soin de bien acculturer les nouveaux arrivants dans l’entreprise avec du présentiel et des points d’étapes réguliers et on encourage les managers à établir des rituels avec leurs équipes pour préserver la cohésion.

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